
Le président de la Fédération djiboutienne de football (FDF), Souleiman Hassan Waberi (52 ans), 4e vice-président de la CAF et candidat à un siège au Conseil de la FIFA (12 mars prochain), revient en exclusivité pour Botola, sur les conditions de l’abrogation de l’amendement qui avait fait scandale en 2012. Une disposition portée par la FAF de Mohamed Raouraoua à l’époque et l’actuel secrétaire général, Nadir Bouznad. Elle était faite sur mesure pour contrer la candidature de l’Ivoirien Jacques Anouma. Une restriction que l’on retrouve —contre l’ensemble de l’arsenal réglementaire national—, dix années plus tard, dans la nouvelle mouture des statuts de la FAF, dont l’élection du nouveau bureau est prévue aujourd’hui.
Botola : En 2016, votre Fédération, soutenue par de nombreuses autres, proposait d’amender l’article 18 des statuts de la CAF, pouvezvous nous parler de cette proposition ?
Souleiman Hassan Waberi : En 2016, notre Fédération djiboutienne, soutenue par deux fédérations africaines, a proposé d’amender l’article 18 des statuts de la CAF. Cet article portait sur les critères d’éligibilité et les conditions de candidature des dirigeants et membres du Comité exécutif. Nous estimions que des ajustements étaient nécessaires pour renforcer la transparence, l’équité, et pour garantir que les instances de la CAF soient composées de dirigeants pleinement engagés à servir les intérêts du football africain. L’objectif était d’aligner nos structures avec les meilleures pratiques en matière de gouvernance sportive internationale.
Botola : Vous étiez pourtant un jeune président, vous n’aviez pas d’appréhension quant au fait de vous attaquer à un texte pareil. Un amendement proposé par un poids lourd de l’Exco à l’époque (Mohamed Raouraoua) !
SHW : C’est vrai, en 2016, j’étais encore un jeune président, mais cela ne m’a pas empêché d’assumer mes responsabilités et de défendre des convictions fortes. Ce qui m’a motivé, c’était avant tout mon engagement pour le progrès du football africain. Je considérais que ce texte, même s’il avait été adopté seulement quelques années auparavant, pouvait être amélioré pour répondre aux défis actuels.
Botola : Qu’est-ce qui a motivé cette proposition, d’où venait-elle, comment avez-vous rassemblé la majorité requise, en sachant que l’article en question avait été voté quatre ans auparavant seulement (2012) ?
SHW : Cette proposition est née d’une observation simple : l’article 18, tel qu’il existait, limitait les possibilités de participation et freinait la dynamique de renouvellement dans la gouvernance de la CAF. À une époque où le football africain évoluait rapidement, nous avons estimé qu’il était nécessaire d’adopter des statuts plus flexibles et inclusifs pour répondre aux aspirations des fédérations membres. Pour rassembler la majorité requise, nous avons mené un travail de sensibilisation rigoureux. Il ne s’agissait pas de convaincre pour convaincre, mais de dialoguer, d’écouter et de trouver des terrains d’entente. Beaucoup de fédérations partageaient nos préoccupations, et cela a facilité la construction d’un consensus autour de la proposition.
Botola : Quels étaient les arguments présentés par votre fédération, pourquoi était-il nécessaire à vos yeux de le changer ?
SHW : L’argument principal était qu’un cadre rigide ne peut pas répondre aux besoins d’un système aussi diversifié que le football africain. Nous avons mis en avant l’idée qu’une gouvernance inclusive et modernisée permettrait une meilleure représentativité et renforcerait la crédibilité de la CAF à l’international. Nous avons également souligné que certaines clauses de l’article 18 n’étaient pas alignées avec les principes de démocratie et d’équité, fondamentaux pour toute organisation de cette envergure. Notre proposition visait donc à renforcer ces valeurs, tout en respectant les intérêts légitimes de toutes les parties prenantes.
Botola : Nous venons d’assister à la levée de la limite d’âge pour les élections de la CAF. L’argument présenté était que cette limite constituait une discrimination. Estimez-vous que l’article en question que vous avez proposé et réussi à abroger était discriminatoire ?
SHW : Je dirais que l’article 18, tel qu’il était formulé, n’était pas nécessairement discriminatoire dans son intention, mais qu’il pouvait être perçu comme limitatif dans son application. Certaines clauses avaient pour effet indirect de restreindre l’accès à des candidatures légitimes et de freiner le renouvellement des instances dirigeantes. L’objectif de notre proposition n’était pas de dénoncer une discrimination, mais plutôt de garantir un système plus équitable et plus ouvert. Il est essentiel que la CAF, en tant qu’organisation phare du football africain, donne l’exemple en adoptant des pratiques de gouvernance modernes, inclusives et respectueuses des principes universels de démocratie.
ENTRETIEN RÉALISÉ PAR NAZIM BESSOL